L’expert.e en santé dans les médias, entre légitimité et controverses

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Edition SFSIC

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Le colloque “L’expert.e en santé dans les médias, entre légitimité et controverses” s’est tenu le 17 mai 2022 à Nancy. Il était labellisé par la SFSIC. Nous vous en proposons une synthèse.

Le premier jour de notre colloque a été consacré à la pandémie et la manière dont les experts ont été sollicités dans les médias ou construits par les médias.

Le professeur Raoult a été cité à plusieurs reprises, démontrant la difficulté pour les journalistes de lui apporter une contradiction, alors même qu’il était « un bon client » et suscitait un vif intérêt de la part du public. Guerrier combattant le virus, anti élite parisienne, voire expert dissident, les manières de le présenter ont été multiples. Autres experts médicaux devenus même animateurs, Michel Cymes et Marina Carrère d’Encausse. La peopolisation de ces médecins, si elle leur fait gagner en notoriété, les vouent davantage aux gémonies quand ils se trompent publiquement. Cela a été le cas de Michel Cymes, obligé de s’excuser pour ses approximations pendant la crise de la Covid 19.

Les règles du choix des experts dans les médias ont aussi été abordées, qu’il s’agisse des recommandations du comité d’éthique de Radio France, ou de la manière dont un pure player comme BRUT expose experts médiatisés qui reprennent la parole institutionnelle et gouvernementale et experts médiatiques, volontiers plus critiques avec celle-ci.

A l’international ont été pointées les différences de crédit apportées à la parole journalistique et des experts sollicités dans les médias.

En Allemagne, la parole experte dans les médias paraît davantage crédible, les médias bénéficiant eux-mêmes d’une meilleure image qu’en France, même les focus groupes allemands ont montré un rejet des « Persokult » créées par les médias.

Au Cameroun, le manque de formation de journalistes scientifiques a été pointée, tout comme en France, les conférenciers invoquant finalement « la débrouillardise » des journalistes capables d’autodidactie.

 

Notre deuxième journée de colloque a interrogé comment l’expertise profane et l’expertise scientifique se construisent, se développent, se répondent et éventuellement se confrontent, sont soumis à controverses, notamment sur les réseaux sociaux.

Les controverses peuvent prendre la forme de prises de parole de médecins experts qui contribuent à un discours normatif et prescripteur sur les questions de bien-être sexuel ou devenant éducateurs à la sexualité à la télévision. Leaders d’opinion ? Juges médiatiques lors d’affaires pénales telles les infanticides ?

Les questions socialement vives montrent des positionnements ambivalents, qui dépendent aussi des logiques éditoriales.

Les controverses peuvent aussi être liées à la parole de médecins qui twittent ou qui sont sur YouTube, dont les prises de position pendant le Covid ont été commentées et débattues, voire menacées lorsqu’ils se prononçaient en faveur de la vaccination. L’incursion de l’émotion lorsqu’elle est liée à la sphère privée du médecin est particulièrement bien perçue par ceux qui le suivent sur Internet. Faut-il y voir ici l’expression bienvenue d’une humanisation du sachant, de l’expert ?

Concernant le patient expert, il est celui qui a éprouvé la maladie, développant une capacité d’auto soin et d’empowerment face à une maladie chronique. Si certains patients ne veulent plus témoigner et partager les éprouvés de leur parcours, d’autres au contraire y voient un bénéfice psychologique, décident de se former dans des université de patients et en changent de métier. Patients influenceurs utilisent les réseaux sociaux pour faire connaître leur maladie. Certains instrumentalisent économiquement leur maladie, ce qui pose des questions éthiques.

Autre manière de légitimer l’expertise profane, la terminologie scientifique utilisée, lorsqu’elle rejoint celle de l’expertise scientifique. « Acteurs de l’ombre », les aidants ont du mal à se définir comme tels, encore plus s’il s’agit de reconnaître leur expertise profane qui repose sur des savoirs expérientiels, soit une expertise expérientielle. Dans les médias, ce sont essentiellement des témoignages individuels qui sont retenus.

La dernière partie de notre colloque a abordé les controverses d’experts médiatisées, dont celle du glyphosate dont l’administration de la preuve mobilise des sources expertes différentes qui démontrent en filigrane des soubassements idéologiques.

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