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Lieu de l’événement Tunis , Tunisie
« Journalisme et innovation à l’ère du numérique » est un colloque international qui met sous la loupe les pratiques journalistiques dans les différents types des médias dans une optique d’innovation. Des facteurs économiques, sociaux, techniques, etc. amènent les acteurs du secteur de la presse à innover dans leurs pratiques. L’impact des outils informatiques en réseau tels que les moteurs de recherche, les médias sociaux et les outils de veille informationnelle et d’agrégation des données ne sont que des exemples des changements observés dans le secteur. Pour faire face à plusieurs pressions et enjeux, les professionnels adoptent des choix créatifs, font incessamment des ré-adaptions, innovent, voire inventent de nouveaux concepts et techniques. Ce colloque se propose d’examiner les pratiques éditoriales, les modèles économiques, les techniques adoptées dans les entreprises de presse et leurs diverses retombées sous l’angle de l’innovation.
Sans être exhaustif, le questionnement du colloque « Journalisme et innovation à l’ère du numérique » s’articule autour des axes suivants :
Axe 1 : innovation technique
Comme il est le cas dans plusieurs autres secteurs, les entreprises de presse connaissent ces dernières décennies des mutations importantes. Ces mutations ont suscité des adaptations, des inventions et des innovations techniques, voire des ruptures. Dans un contexte marqué par des évolutions accélérées, des médias installent des observatoires, des ateliers de réflexion et des laboratoires pour expérimenter de nouvelles techniques. Parfois on engage les journalistes et les différents personnels de l’entreprise dans ces processus. D’autres entreprises font appel à des consultants et à des compétences d’autres domaines pour expérimenter de nouveaux modèles, favoriser un journalisme créatif et faire émerger de nouvelles approches (Dupuy, 2013).
Les innovations touchent tout le processus d’information, du choix du sujet à la réception. Des dispositifs de signalement et de veille sont mis place. D’autres outils en ligne sont mobilisés pour recueillir des témoignages, des propositions de sujet, etc. Des entreprises investissent dans la transmission automatisée des informations (Mercier, Pignard-Cheynel, 2014 ; Rieder, Smyrnaios, 2012).Réalité augmentée, algorithmes de fact-checking automatique, applications mobiles et logiciels de storytelling offrant des univers immersifs et interactifs, etc. sont des exemples des innovations qui semblent mettre la technologie au service du contenu éditorial et améliorent l’expérience lecteur/utilisateur. Terminaux d’internet des objets, intelligence artificielle, robotisation de l’information journalistique, etc. sont encore des perspectives d’évolution possible dans le secteur. Les approches technocentrées sont souvent décriées par divers acteurs, notamment parmi les professionnels qui s’inquiètent de la technicisation du métier et craignent de perdre l’essence du journalisme. D’autres plaident pour le renforcement de la culture technique des journalistes (Joannès, 2010). L’innovation technique est considérée parfois comme une condition de survie dans la mesure où le journalisme doit tenir compte et s’intégrer dans un écosystème dans lequel les dispositifs techniques, tels que les terminaux mobiles, jouent un rôle important.
Axe 2 : innovation éditoriale et réorganisation des rédactions
Les entreprises de presse profitent des possibilités de création et d’hybridation offertes par le numérique en général, en transformant le contenu journalistique en contenu essentiellement cross media. Dans cette perspective, un renouvellement des modèles éditoriaux s’est imposé : diversité des formats de production, contenus hypermédia, délinéairisation de la diffusion, nouvelles narrations et bien d’autres pratiques éditoriales marquent l’offre journalistique.
Dans une société imprégnée par une ubiquité ascendante, la désaffection des publics des médias dits classiques pousse les acteurs du secteur de la presse à s’orienter vers des terminaux mobiles. C’est dans ce même contexte de restructuration qu’apparaissent des formes renouvelées de journalisme. Le journalisme de solutions (Amiel, 2017), l’information présentée sous forme de jeu vidéo ou de newsgame (Carlino, 2017), la vidéographie, le journalisme de données, la vérification des faits ou fact-checkingse développent, depuis plusieurs années, dans des rédactions occidentales. Quels changements induisent-ils dans les pratiques journalistiques ? Ces mêmes pratiques sont récentes, rares ou inexistantes dans des médias dans les pays arabes et africains d’où l’intérêt de dresser un état des lieux sur les pratiques en question dans ces régions.
Face aux mutations générées par internet, il est légitime de s’interroger sur l’organisation des rédactions web ? Y a-t-il une hybridation des compétences vers une polyvalence accrue et/ou une forte spécialisation de nouveaux métiers qui intègrent les rédactions ? Les nouvelles pratiques éditoriales sus-indiquées ont nécessité une réorganisation des rédactions (Mercier, Pignard-Cheynel, 2014). Certains médias ont fusionné et ont appuyé les services web et les services print ou audiovisuels. D’autres ont gardé la bipolarité des rédactions tout en mobilisant des compétences transversales pour valoriser le même contenu suivant la nature du support. La radio visuelle est un exemple des mutations et/ou de reconversion que connaissent les entreprises de presse.
Le contenu créé par les internautes (User Generated Content), une des caractéristiques des médias sociaux, profitent également à la presse. Revisités, les modèles éditoriaux intègrent les publics en tant que figure importante dans le processus de production. Des médias délèguent des tâches aux publics. En ce sens le crowdsourcing représente un appel ouvert à des journalistes citoyens pour témoigner, collaborer et participer activement dans la production de l’information. Dans la même logique participative, les publics peuvent même évaluer et annoter des contenus réalisés par des professionnels. Aussi, plusieurs médias créent autour des plateformes principales des blogs d’information, des forums et plus généralement des espaces virtuels de diffusion, de discussion et d’information participative destinés aux lecteurs-contributeurs. Les choix éditoriaux à l’œuvre réussissent-ils à capter l’attention d’un public de plus en plus fragmenté ? Comment le contenu journalistique se positionne-t-il dans la grande masse de données web ? Dans quelle mesure ce contenu est impacté par les facteurs exogènes inhérents à l’environnement numérique tels que les algorithmes ? Comment les journalistes perçoivent-ils ces expériences ?
Les événements majeurs inattendus parfois bouleversent le travail des médias. La propagation du virus Covid-19 dans le monde ce dernier temps a visiblement impacté le travail des rédactions. Les contraintes imposées par la pandémie ont poussé les professionnels à ajuster leurs techniques de travail, à adopter de nouvelles pratiques et à chercher des alternatives pour assurer la continuité de l’entreprise. Ainsi, l’innovation et la créativité sont parfois imposées par des conjonctures d’où l’intérêt de revenir sur les pratiques journalistiques durant cette pandémie sous l’angle de l’innovation.
Axe 3 : Innovation économique
Les entreprises de presse ont connu des mutations économiques (baisse des ventes et de l’audience des médias classiques, des annonceurs qui s’orientent davantage vers des plateformes en ligne, effritement des publics, etc.). Ceci pousse les propriétaires à faire face à des défis et à chercher et développer de nouvelles niches offertes par internet.
Dans ce contexte, se développe un ensemble de modèles d’affaires articulés à des approches éditoriales innovantes. Les modes classiques de financement, à savoir la publicité et la vente connaissent des évolutions importantes. Le crowdfunding ou le financement participatif par la « foule » d’internautes constitue l’une des réponses qu’apportent des médias non-lucratifs pour faire face au tarissement des sources classiques de financement et défendre un journalisme dit d’intérêt public. Modèles fondés sur l’abonnement en ligne, intégration des liens sponsorisés, monétisation des podcasts, vente personnalisée, etc. se développent pour créer de la valeur dans les entreprises de presse.
Par ailleurs, si dans quelques pays occidentaux les éditeurs de presse ont trouvé un accord avec Google pour rémunérer l’indexation de leurs contenus informationnels, qu’en est-il des autres pays ? Plus généralement dans quelle mesure les intermédiaires de l’information ou les « infomédiaires » (Rebillard, Smyrnaios, 2010) tels que Google, Facebook, Twitter, Instagram, etc. impactent les pratiques des entreprises de presse sur le plan économique et au-delà ? Comment des activités d’autopromotion des médias sur ces plateformes sont valorisées financièrement ? Quelles conséquences pour les modèles économiques tributaires de ces acteurs dominants ? Pourquoi dans un environnement considéré concurrentiel (Goasdoué, 2015) ces géants du web développent une panoplie d’outils et de techniques et proposent des projets tels que Facebook Journalism Project et Google News Initiative au profit des professionnels et des amateurs du journalisme ? Comment garantir la viabilité économique des entreprises de presse, dans les pays arabes et au-delà, à la lumière des changements que connait le secteur ?
Axe 4 : impact de l’innovation sur les identités professionnelles
Ce quatrième axe se veut synthétique et porte essentiellement sur les retombées des mutations que connait le secteur. Dans le processus d’innovation, les volets technique, éditorial et économique de la presse se développent de manière concomitante et s’influencent mutuellement. Par exemple, c’est au nom de l’indépendance éditoriale que des médias sollicitent les publics afin de glaner les fonds nécessaires à leur continuité. Les diverses innovations semblent impacter l’essence même du journalisme. Désormais on exige des journalistes d’être polyvalents en disposant d’autres compétences comme le management ou le marketing. L’acquisition des compétences journalistiques spécifiques au journalisme contemporain peut s’appuyer sur le ressort expérientiel de la gamification (Lazăr, Morelli, 2019). Les entreprises de presse font appel à d’autres métiers dans le travail journalistique comme les informaticiens et les spécialistes de la communication et du marketing (Webmarketer, community manager, responsable référencement, etc.). Ce sont toutes des pratiques qui versent dans le « journalisme de communication » (Hubé, 2010 ; Charron, 2007).
Les pratiques en question s’accentuent de plus en plus à l’ère du numérique. Dans quelle mesure les activités promotionnelles, tel que le journalisme de marque, appuyées par les nouvelles techniques de narration influent-elles sur l’un des rôles majeurs de la presse qui consiste à informer, expliquer et débattre ? Comment les journalistes d’aujourd’hui vivent et perçoivent ces mutations ? Quel est l’impact sur les identités professionnelles ? Quelles sont les retombées pour les publics ? Il va sans dire que des enjeux éthiques sont inhérents à ces questions d’où la nécessité de s’interroger, à titre d’exemple, sur la place du journalisme de qualité dans cette panoplie de concepts et modèles. Bien que ces innovations se fassent sentir à l’échelle mondiale, il est adéquat de se poser la question suivante : comment des pays arabes et africains, avec leurs diverses propriétés, réalités et écosystèmes respectifs vivent ces mutations à l’ère du numérique ? Par exemple, les priorités en matière d’innovation dans le secteur du journalisme dans les pays qui vivent une transition politique ou des conflits armés diffèrent de ceux des pays occidentaux.
Ce colloque a pour objectif principal de faire l’état des lieux et de questionner les pratiques émergeantes, les évolutions possibles mais aussi les résistances dans le secteur journalistique. Il s’intéresse également aux approches adéquates pour saisir et/ou modéliser ces pratiques. Quelles démarches adopter pour comprendre ces pratiques et mutations, parfois évasives et disparates ? Comment approcher méthodologiquement les dispositifs journalistiques en ligne tout en dépassant l’approche techniciste ? D’ailleurs, dans cette optique Julie Posetti (2018) met en avant l’importance d’une approche intégrée et stratégique d’innovation en journalisme englobant les différentes facettes de la problématique et dépassant les « petites améliorations » incessantes dans le secteur. Aussi, l’élargissement, voire la dilution du journalisme (Ruellan, 2005) et la diversification accrue de ses acteurs nécessitent, peut-être, des chercheurs en SIC de s’ouvrir davantage sur d’autres disciplines comme les statistiques et la gestion. Le colloque international « Journalisme et innovation à l’ère du numérique » se propose de questionner ces différents aspects et au-delà à la lumière de l’innovation.
Calendrier
- 20 novembre 2020 : Diffusion de l’appel à communications
- 15 janvier 2021 : date limite d’envoi des propositions
- 29 janvier 2021 : Réponses aux auteurs
- 8, 9 avril 2021 : tenue du colloque
- 30 avril 2021 : remise de la version complète des textes
- 28 mai 2021 : retour des commentaires et recommandations des évaluateurs
- 15 juin 2021 : remise des versions finales des textes
- Automne 2021 : publication des actes
Modalités de contribution
Les propositions doivent inclure les éléments suivants :
- Les coordonnées : nom, adresse mail, université et titre de la communication.
- Une proposition de contribution de 3000 signes maximum (espaces non compris).
- Une brève bibliographique.
- Les propositions sont acceptées en arabe, français et anglais et seront évaluées en double aveugle.
- Les propositions sont à envoyer par courriel aux deux adresses suivantes : colloqueipsi2021@gmail.com et fredj.zamit@yahoo.de
Comité scientifique
- Dr. Chahira Ben Abdallah, Université de la Manouba, IPSI, Tunisie.
- Dr. Amine Ben Messaoud, Université de la Manouba, IPSI, Tunisie.
- Dr. Moez Ben Messaoud, Université de Qatar, Qatar
- Pr. Marc-François Bernier, Université de Ottawa, Canada.
- Dr. Laurent Bigot, Université de Tours, EPJT, France.
- Pr. Larbi Bouamama, Université de Mostaganem, Algérie.
- Pr. Bertrand Cabedoche, Université de Grenoble Alpes, France.
- Pr. Salwa Charfi, Université de la Manouba, IPSI, Tunisie.
- Pr. Larbi Chouikha, Université de la Manouba, IPSI,Tunisie.
- Dr. Mohamed Ali Elhaou, Université de Tunis, ISAD, Tunisie.
- Pr. Noureddine El Miladi, Université de Qatar, Qatar.
- Dr. Ayda Fitouri, Université de la Manouba, IPSI, Tunisie.
- Dr. Zohra Gharbi, Université de la Manouba, IPSI, Tunisie.
- Dr. Yosra Gazbar, Université de la Manouba, IPSI,Tunisie.
- Prof. Mohammed Hamdane, Université de la Manouba, IPSI, Tunisie.
- Dr. Sadok Hammami, Université de la Manouba, IPSI, Tunisie.
- Dr. Walid Hayouni, Université de la Manouba, IPSI, Tunisie.
- Pr. Ahmed Hidass, Université de Rabat, ISIC, Maroc.
- Pr. Abdelkrim Hizaoui, Université de la Manouba, IPSI, Tunisie
- Dr. Enrique Klaus, Université de Galatasaray, Turquie.
- Dr. Moncef Louati, Université de la Manouba, IPSI, Tunisie.
- Dr. Sami Melki, Université de la Manouba, IPSI, Tunisie.
- Dr. Najeh Missaoui, Université de la Manouba, IPSI, Tunisie.
- Dr. Pierre Morelli, Université de Lorraine, France.
- Dr. Heni Moubarek, Université de la Manouba, IPSI, Tunisie.
- Pr. Sihem Najjar, Université de la Manouba, IPSI, Tunisie.
- Pr. Saddek Rabah, Université de Qatar, Qatar.
- Pr. Denis Ruellan, Université de Sorbonne, CELSA, France.
- Dr. Nozha Smati, Université de Lille 3, France.
- Dr. Ikram Toumi, Université de Kent, U.S.A.
- Pr. Jamel Zran, Université de la Manouba, IPSI, Tunisie.
Coordinateur scientifique du colloque
- Dr. Fredj Zamit, Université de la Manouba, IPSI, Tunisie
Comité d’organisation
- Olfa Beji, Konrad Adenauer Stiftung, Tunisie.
- Elhem Jouini, Institut de Presse et des Sciences de l’Information, Tunisie.
- Mohamed Drissi, Institut de Presse et des Sciences de l’Information, Tunisie.
Mots-clés
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- Innovation
- Journalisme