Penser la communication à l’aune des approches sémiotiques et pragmatiques

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Event place Université Paul-Valéry, Route de Mende , Montpellier 34000, France

Le Groupe de Recherche sur les Approches Sémiotiques et Pragmatiques Internationales de la Communication se fixe pour ambition d’œuvrer au soutien, au déploiement et à la pérennisation de tous les travaux qui adoptent une posture pragmatique et compréhensive des phénomènes de production et de circulation du sens, permettant de mettre au jour les mécanismes agissant dans les situations communicationnelles.
La mise en commun des socles théoriques, des méthodes, des pratiques de recherche, la comparaison des itinéraires intellectuels, des spécificités nationales, culturelles ou disciplinaires est considérée comme un atout majeur de cette entreprise au service de la compréhension des phénomènes de communication, qu’ils soient situés dans des cadres sociaux artistiques, culturels, médiatiques, réticulaires, organisationnels ou interpersonnels. Le but de ce premier colloque est ainsi de produire un panorama des objets, méthodes et approches concernées.
Dans cet esprit, toute communication, qu’elle porte sur un cas pratique, une méthode, un point théorique ou épistémologique, qui mobilise une sémiotique et adopte une démarche pragmatique, sera la bienvenue. De même, tous les champs de questionnement de la communication sont concernés, des objets médiatiques, culturels et artistiques y compris en contexte numérique, à la communication institutionnelle, interpersonnelle, organisationnelle, politique, en passant par les industries culturelles et les ICC, l’économie politique de la communication, la communication en santé, les big data, la communication et le sensible, etc.

Le pragmatisme implique de considérer le phénomène communicationnel du point de vue d’abord de ses « effets » (pour reprendre la formule pragmaticiste de C.S Peirce1) et non, de ses « causes » classiquement supposées comme inhérentes aux objets et/ou aux dispositifs. Considérer que le sens ne vient pas du texte, mais vient au texte (pris au sens générique), sous la pression du contexte, pour reprendre Roger Odin (2000a), permet de s’affranchir des carcans légitimistes des analyses formelles et immanentistes, tout en offrant la possibilité d’étudier tous les phénomènes de communication, légitimés ou non, selon un angle communicationnel qui met le sujet percevant (Worth, Adair, 1972) – la « réception », l’énonciation, la médiation, les représentations, les productions de sens, les lectures, etc. – au centre de nos questionnements. D’autre part et conséquemment, le problème du sens, de sa formation, de sa circulation, de sa (non-)communication (Odin, 2000a) qui se pose alors en termes de sciences humaines et sociales – puisqu’il s’agit de poser la question aux sujets et non plus aux objets et dispositifs – nous enjoint à nous doter d’outils sémiotiques qui soient opérants avec la posture pragmatique. École de Paris, de Bologne, de Liège, de Limoges, École Américaine, sémiologie saussurienne, barthésienne, sémiotique greimassienne ou en découlant comme la sémiotique tensive, sémiotique peircéenne, sémio-pragmatiques (odinienne ou autre), sociosémiotique, sémiotique sociale, théories de l’énonciation et des actes de langage, pragmatique linguistique, etc. : un travail d’envergure est à mener pour cartographier, rassembler ou façonner des instruments opératoires qui permettent de penser les phénomènes communicationnels en termes de production et circulation de sens.
Leur causalité est à chercher d’abord et avant tout dans les déterminations sociologiques, anthropologiques, cognitives, psychologiques, sémiotiques des sujets en situations de contact avec des objets (matériels ou immatériels) construits collectivement et expériencés singulièrement comme porteurs de sens.

Ce 1er colloque du GR ASPIC se veut le lieu de cette pensée. Partant d’un principe séminal que la communication nécessite un prisme pragmatique et un socle sémiotique pour être heuristiquement appréhendée, le colloque se veut une occasion d’échanges, de mise en commun, d’acculturations, mais aussi de mises en perspectives, qui seront autant de points d’entrées, non exclusifs les uns aux autres.

La variété des approches pragmatiques et sémiotiques de la communication n’a d’égale que la diversité des objets et terrains et la multiplicité des méthodes imaginées et des bricolages théoriques échafaudés. Comment recueillir des données, produire un matériau pour l’analyse ? Les enquêtes traditionnelles sur les publics ou les situations de communication suffisent-elles à renseigner les problématiques que pose un ancrage qui prétend ne pas partir de l’objet pour mettre au jour les mécanismes de production de sens ? Comment rendre compte à la fois de l’expérience qui fonctionne selon l’illusion immanentiste (Odin, 2011) et en même temps mener une analyse qui postule des processus inverses pour une bonne part inconscients ? La « question du public » (Odin, 2000b) peut-elle être évacuée, mais alors, à qui serait-elle déléguée ? Comment travailler sur les publics des plateformes, souvent inatteignables pour des raisons purement techniques et pratiques, en dehors des traces d’énonciations ? Mais ces dernières sont-elles suffisantes, ne constituent-elles pas un biais majeur en faisant que les rapports participatifs sont surreprésentés ? Y-a-t-il une spectature particulière au « régime numérique » qui ne soit pas « 2.0 », comment la saisir dans ce cas ? Selon les terrains, les objets, les chercheuses et les chercheurs se trouvent régulièrement dans l’obligation d’adapter les méthodes, les outils théoriques, les modèles. Exposer ces problèmes à l’aune des situations particulières, discuter des résultats et de leurs limites éventuelles permet d’enrichir les différentes recherches par la mutualisation des astuces, des raisonnements, des braconnages disciplinaires et théoriques. Peut-on imaginer des outils qui fonctionnent sur les usages tant du smartphone que de la littérature, sur les relations interpersonnelles que sur des phénomènes macrosociologiques ? Comment naviguer dans les échelles, du cas particulier de production singulière de sens aux cadres sociaux (et psychologiques, physiques, etc.) des modes de production de sens ? La pluridisciplinarité est-elle indispensable ? Et si oui, faisable dans quelle mesure, à quel prix, selon quelles conditions, avec quelles perspectives ? Selon les configurations propres aux disciplines, aux institutions, aux aires culturelles et linguistiques, les moyens de la recherche, les relations inter-, transdisciplinaires, à l’intérieur mais aussi à l’extérieur des seules sciences humaines et sociales, recouvrent des réalités extrêmement variées, mais qui sans doute partagent aussi nombre de paramètres et d’enjeux. La diffusion des résultats associée à leurs méthodes de production, l’examen des discours académiques ainsi que leurs conditions d’existence, le partage d’expérience – qui passe aussi par les échecs, les impasses et les apories –, la discussion de projets et de solutions envisagées ne peuvent qu’enrichir les usages de chacune et chacun tout en évitant de refaire ce qui a déjà été fait ou de ne pas oser faire ce qui ne l’a jamais été.

De même, les obédiences et origines disciplinaires et théoriques sont-elles vouées à demeurer des clivages ou peuvent-elles être dépassées, repensées, fusionnées, effacées, au prix peut-être d’abandons heuristiques ? Par exemple, comment continuer l’adaptation qu’avait initiée Roger Odin du modèle sémio-pragmatique pour le confronter à des usages d’objets autres qu’audiovisuels ? Est-il possible de modéliser une organisation à partir de la sémiotique peircéenne ? La notion d’interprétant, de sémiose triadique fonctionne-t-elle avec des résultats issus des neurosciences ou de la psychologie sociale ? L’analyse filmique est-elle utile ou au contraire prohibée dans le cadre d’une approche pragmatique et sémiotique ? Comment la sémiotique saussuro-hjelmslevo-greimassienne peut-elle se saisir de la notion d’espace mental (Odin, 2016) ? Comment articuler, pourquoi articuler les travaux d’Umberto Eco avec ceux de l’École de Perpignan ou la sociologie de l’art et de la culture française ? Faut-il penser systématiquement les résultats d’approches sémiotiques et pragmatiques à l’aune de cadres indépendants mais déterminants (économie politique de la communication, socio-économie, universaux physiques, histoire, géographie, etc.) ? Et si oui, comment faire ? Faut-il se limiter à l’étude des usages des objets symbolisés (médias, arts, culture) ou le champ des possibles est-il infini en théorie, limité par des insuffisances pratiques, des censures institutionnelles et académiques ? Doit-on relire et traduire les travaux « immanentistes » à l’aune pragmatique ? Comment la(les) sémiotique(s) peu(ven)t-elle(s) s’enrichir de recherches qui ne la(les) mobilisent pas ? Faut-il chercher à unifier au risque de l’arasement et du dogmatisme, ou accepter les incompatibilités au risque de l’éclatement et de la dispersion ? Les travaux et courants qui ne prennent pas en compte la nécessité pragmatique ni la dimension sémiotique des phénomènes humains doivent-ils être ignorés, pris au second degré comme de simples matériaux (des discours parmi d’autres, singulièrement situés, qui émergent toujours de l’expérience et ne s’affranchissent pas de l’illusion immanentiste) ou au premier comme pouvant apporter des connaissances remobilisables en contexte pragmatique et sémiotique ? Il ne faut pas négliger la dimension politique de ces interrogations, qui a déjà été soulevée (Denizart, Péquignot, 2022 : 6) : la posture épistémologique, le choix théorique, l’élaboration des méthodes construisent le discours scientifique (ou du moins reconnu comme tel), plus ou moins silencieusement qu’ils sont pensés et assumés comme tels et tout autant que le choix (ou le non-choix) des objets d’étude. Objets et posture vont souvent de pair, et il n’y a assurément pas de hasard en cela, même si chaque acteur, à son niveau, n’est pas nécessairement dans l’expression d’une intention particulière. Prendre en compte la nécessité pragmatique est là entre autres pour rappeler l’inévitable situation de tout discours.
Autrement dit, s’il est admis que tout discours n’en vaut pas un autre pour des raisons scientifiques (logiques, éthiques, etc.), il faut accepter que tout discours « scientifique » n’en vaut pas un autre pour des raisons sociales et politiques, et ce, que cela soit dans ses conditions d’existence et donc de justesse et de réfutabilité, ou dans ses conditions de fonctionnement et donc de production de connaissance ou de reproduction des systèmes de domination.

Un des enjeux de ce colloque est ainsi de pouvoir discuter du positionnement de la recherche, dans l’académie, la cité et le monde et de la dimension de manifeste que peut, doit, adopter (ou au contraire refuser d’adopter, ignorer) la posture pragmatique et l’approche sémiotique.

Les propositions venant de différents horizons au sein des sciences humaines et sociales, mais aussi au-delà sont encouragées. De même, tous les objets sont les bienvenus, sans restriction de champs. Les propositions théoriques, méthodologiques, construites sur un cas particulier sont toutes les bienvenues, tant qu’elles contribuent à la réflexion sur les thématiques du colloque.

Modalités pratiques

Les propositions de communication, de deux pages maximums, accompagnées d’une courte notice bio-bibliographique pourront être envoyées aux adresses jean-michel.denizart@univ-tln.fr et julien.pequignot@gmail.com, avant le 15 décembre 2025.

  • Les réponses aux participant·es·s se feront courant janvier 2026.
  • Les communications auront une durée de 20 minute suivie d’un temps d’échange avec la salle.
  • Le colloque fera l’objet d’une publication d’une sélection de textes aux Presses Universitaires de la Méditerranée.

Comité scientifique international

  • Adjiman Rémi, PRISM, Aix-Marseille Université
  • Allard Laurence, IRCAV, Université Lille 3
  • Barrette Pierre, CRILCQ, Université du Québec à Montréal
  • Bonfils Philippe, IMSCI, Université de Toulon
  • Boni Marta, Université de Montréal
  • Buckland Warren, Oxford Brookes University
  • Casetti Francesco, Yale University
  • Chateauvert Jean, Université du Québec à Chicoutimi
  • Chambat-Houillon Marie-France, CARISM, IFP, Université Panthéon-Assas
  • Collet Laurent, LERASS, Université de Montpellier Paul-Valéry
  • Conde Juan-Alberto, Université de Bogota Jorge Tadeo Lozano
  • Delaporte Chloé, RIRRA21, Université de Montpellier Paul-Valéry
  • Denizart Jean-Michel, IMSIC, Université de Toulon
  • Dondero Maria-Giulia, FRS-FNRS, Université de Liège
  • Dusi Nicola, Università di Modena e Reggio Emilia
  • Eugeni Ruggero, Università Cattolica del Sacro Cuore, Milan
  • Georges Fanny, IRMECCEN, Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
  • Kristen Guido, Universität Mainz/Filmuniversität Babelsberg
  • Lefebvre Martin, Concordia University
  • Leveneur Laurence, IDETCOM, Université Toulouse Capitol
  • Lorenzo Sylvie, CeReS, Université de Limoges
  • Merlin Dieter, Institut für Fachwissenschaft, Fachdidaktik und Pädagogik der Sekundarstufe
  • Mücke Laura Katharina, Universität Mainz, Universität Vienna
  • Nguyen-Pochan Thi Thanh Phuong, CHUS, Université Catholique de l’Ouest
  • Péquignot Julien, LERASS, Université de Montpellier Paul-Valéry
  • Sainati Augusto, Università Suor Orsola Benincasa, Napoli
  • Soulez Guillaume, IRCAV, Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
  • Thévenin Olivier, CERLIS, Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
  • Spies Virginie, CNE, Université d’Avignon
  • Weber Thomas, Universität Hamburg

Références

Denizart, Péquignot. (2022). La sémio-pragmatique : théories et pratiques. Cinéma, télévision, audiovisuel, numérique. Presses universitaires de Provence.

Odin Roger. (2000a). De la fiction. Bruxelles, De Boeck.

Odin Roger. (2000b). « La question du public. Approche sémio-pragmatique. Réseaux, vol. 18, n° 99, p. 49-72.

Odin Roger. (2011). Les espaces de communication. Introduction à la sémio-pragmatique. Grenoble, PUG.

Odin Roger. (2016). « Espaces de communication physiques, espaces de communication mentaux ». In Chateauvert Jean et Delavaud Gilles (dirs.). D’un écran à l’autre : les mutations du spectateur, Paris, INA/Harmattan, p. 331-342.

Peirce Charles S. (1879). « Comment rendre nos idées claires ». Revue philosophique de la France et de l’étranger, quatrième année, tome VII, janvier, p. 39-57.

Tiercelin Claudine. (1993). C.S. Peirce et le pragmatisme. Paris, PUF.

Worth Sol, Adair John. (1972). Through Navajo Eyes : An Exploration in Film Communication and Anthropology. Bloomington (États-Unis, Indiana), London (Royaume‑Uni), Indiana University Press.Odin 2000

Note

  1. « Considérer quels sont les effets pratiques que nous pensons pouvoir être produits par l’objet de notre conception. La conception de tous ces effets est la conception de l’objet ». Peirce Charles S. (1879), « Comment rendre nos idées claires », Revue philosophique de la France et de l’étranger, quatrième année, tome VII, janv., pp. 39-57, cité dans Tiercelin Claudine (1993), C. S. Peirce et le pragmatisme, Paris, Presses universitaires de France, p. 29.