Hybridation des formations : de la continuité à l’innovation pédagogique ?

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Event place Colloque Ticemed13, Université Panteion , Athènes , Grèce

Si la question de l’hybridation de la formation trouve aujourd’hui un écho particulier, elle n’est pourtant pas récente et ne date pas de la crise actuelle liée à la pandémie Covid 19. Dès la popularisation des télécommunications, des programmes éducatifs sont proposés à la radio et à la télévision -généralement sous le vocable de télé-enseignement- permettant ainsi d’allier présence et absence dans des dispositifs pédagogiques spécifiques . L’objectif était de permettre à des populations empêchées, physiquement ou pour raisons personnelles, d’accéder à des formations dans un souci de démocratisation et de massification de l’enseignement. L’hybridation concernait alors spécifiquement un enseignement mixte, dans lequel cours à distance s’alliaient à des temps de regroupement en présentiel dans des lieux propres. Ces enseignements étaient alors majoritairement organisés dans des structures dédiées, pionnières de la formation à distance, (Remond, 2017). L’adoption et la popularisation du terme « hybridation » pour désigner ces formes d’enseignement mêlant présentiel et distanciel témoigne de la fin des débats de la communauté éducative pour opposer présence à distance (Remond et al., 2020 ; Knauf & Falgas, 2020 ; Peraya et al, 2014).

Dans les années 2000, l’arrivée du numérique a vu le développement de nouvelles technologies de l’information et de la communication, permettant d’envisager une ouverture du marché de la formation à distance tout en rentabilisant les coûts (Morin, 2003). D’un point de vue institutionnel, l’hybridation semble alors de plus en plus instrumentalisée « pour satisfaire aux différentes injonctions reçues par les enseignants, en termes de productivité, d’évaluation, comme de labellisation », (Paquienséguy, Perez-Fragoso, 2011). Sur le terrain, les pédagogues trouvent cependant dans ces nouveaux outils un moyen de renouveler leurs enseignements, en proposant des modalités adaptées aux nouveaux publics dans un souci de qualité. Est alors interrogée la capacité des établissements «à soutenir la construction des compétences (générales et numériques) des étudiants » et le développement d’une recherche exigeante et pluridisciplinaire (Loisy et Lameul, 2015). Aujourd’hui, l’« hybridation » ne semble plus exclusivement définie comme un dispositif particulier d’enseignement à distance, mais comme une intégration systématique du numérique pour soutenir les enseignements et individualiser les parcours, et qui peut recouvrir différentes dimensions: modalités d’enseignement/apprentissage ou bien paradigme pédagogique propre (Peltier & Séguin, 2021).

Par ailleurs, la crise sanitaire récente et l’usage généralisé de l’enseignement à distance a accéléré l’agenda politique en termes d’hybridation. En témoigne, en France par exemple, le lancement du 4ème programme d’investissement d’avenir (PIA) annoncé en septembre 2020 dans lequel l’enseignement numérique est cité comme un investissement prioritaire et stratégique de ce plan de relance . Pourtant, si le numérique éducatif apparait comme une solution d’avenir, le risque est grand qu’il creuse encore les fractures, autant à une échelle nationale qu’internationale. En 2018, la 12ème édition du colloque Ticemed s’était déjà penché sur les conditions favorables aux changements des pratiques pédagogiques en présentant des initiatives contrastées malgré la prolifération des ressources numériques disponibles à l’échelle internationale, et respectueuses des contextes locaux (Remond et al, 2021). L’appropriation des nouvelles technologies dans les enseignements demandent effectivement du temps, de la formation et suppose des expérimentations venant du terrain lui-même. Elles sont donc difficilement généralisables, tout en restant adaptables aux différentes situations.

Depuis 2003, l’Association internationale Ticemed et son colloque bisannuel fournit un cadre aux réflexions portant sur l’intégration du numérique dans l’enseignement : de la question de l’humain dans la formation à distance, aux enjeux des multiculturalités en contexte éducatif (Bonfils et al., 2015), en passant par l’ouverture des sources (Massou et al., 2019), l’éducation aux médias (Bonfils et al., 2020) ou la pédagogie dans l’enseignement secondaire et supérieur (Bonfils et al., 2016 ; Remond et al., 2021). En réunissant un ensemble d’acteurs scientifiques du pourtour de la Méditerranée, le corpus d’études scientifiques accumulé a permis de révéler un ensemble de problématiques autour de la médiation et de la transformation pédagogiques avec le numérique, dans des contextes éducatifs variés au sein de la francophonie et dans d’autres contextes culturels.

Pour sa 13ème édition, qui aura lieu en mode présentiel à l’Université Panteion d’Athènes les 17 et 18 octobre 2022, la problématique retenue vise à rassembler des contributions scientifiques permettant d’adopter une posture réflexive et critique face aux conséquences de la « continuité pédagogique » sur l’innovation pédagogique avec le numérique :

  • Comment s’est adaptée la forme universitaire (et scolaire) aux contraintes de la pandémie ? Ces évolutions sont-elles ponctuelles ou durables ?
  • Dans quelle mesure la situation d’un enseignement à distance généralisé et contraint a-t-elle révélé des rapports complexes et ambigus à l’innovation pédagogique et aux usages du numérique en éducation ?
  • Dans quelle mesure la crise sanitaire a-t-elle dévoilé des fractures, des impensés, des oppositions de valeurs sur les usages pédagogiques du numérique au sein de la communauté éducative ?
  • Dans quelle mesure s’est-elle au contraire révélée un accélérateur d’innovations et/ou de changement dans les pratiques pédagogiques et numériques chez les enseignants et apprenants ?
  • Le retour au présentiel à la rentrée scolaire et universitaire de 2021 a-t-il marqué une réapparition totale ou partielle des pratiques antérieures à la crise sanitaire, ou est-il le début de nouvelles pratiques hybrides et durables ?
  • La continuité pédagogique a-t-elle fait émerger de nouvelles attentes sur les usages pédagogiques du numérique chez les apprenants et les enseignants ?
  • Quel est l’impact de la crise sanitaire sur l’évolution des environnements et/ou écosystèmes d’apprentissage et d’enseignement numériques proposés par les établissements ? Et sur les environnements numériques personnels d’apprentissage ?
  • Quelles sont les nouvelles formes d’hybridation des enseignements apparues par l’usage contraint des environnements numériques pendant la crise sanitaire et comment ces nouvelles formes ont-elles redéfini les pratiques enseignantes et étudiantes ?
  • Quelles sont les modalités scénaristiques des environnements éducatifs connectés et des offres de cours en ligne complétant les cours en présentiel ou prétendant s’y substituer ?L’organisation de cette 13ème édition du colloque international de l’association TICEMED au sein du Département de Communication, Médias et Culture de l’Université Panteion de Sciences Sociales et Politiques n’est pas hasardeuse. Plus qu’une partie remise (provoquée par les restrictions sanitaires liées à la pandémie lors de l’édition précédente du colloque), il s’inscrit dans une volonté prononcée de penser les enjeux de l’hybridation des formations en lien avec les répercussions culturelles -voir transculturelles- dans leur dimension communicationnelle. Et aussi de penser le « média » comme médiation (Martìn Barbero, 2002).Il s’agira tout particulièrement d’interroger les formes d’hybridations qui traversent le domaine éducatif et les communautés d’apprentissage, qui sont liées à l’usage devenu massif – parfois contraint – des environnements d’enseignement et d’apprentissage en ligne, et qui redéfinissent les pratiques professionnelles des enseignant·es et, plus largement, des médiateur·rice·s, mais aussi des élèves et étudiant·es.

    Ticemed 13 a ainsi pour objectif de dresser un état des lieux du rapport de l’enseignement au numérique en contexte post-Covid. Cependant, et dans la mesure du possible, il est souhaité que les propositions de communication lient l’actualité récente aux initiatives passées afin de les (re)mettre en perspective, pour comprendre de quelle manière et dans quelle mesure ce rapport pouvait être parfois préfiguré autant dans les politiques publiques que dans les initiatives de terrain plus confidentielles.